EFFETS ÉPOUVANTABLES DU TRAVAIL FORCÉ

(suite)

Voici l’exposé des articles contenus dans le Dictionnaire des Lois au sujet du travail humain à l’âge de la plus tendre enfance, de l’adolescence, époque qui d’après les hygiénistes devrait être exclusivement consacrée au développement physique par le libre exercice des facultés naissantes.

Au lecteur conscient qui prendra connaissance de ce qui va suivre, est laissé le soin de juger du degré de fourberie et d’hypocrisie recélées dans les subterfuges employés par les dirigeants, sous couleur de législation. Les lois établies par eux offrent toutes facilités de les transgresser et les exploiteurs qui les comprennent bien ainsi n’ont garde de manquer de le faire.

Que l’on en juge:

Section 1re. – Age d’admission. – Durée du travail.

Art. 1er. – Les enfants et les filles mineures ne peuvent être employés à un travail industriel dans les manufactures, fabriques, usines, mines, chantiers et ateliers, que sous les conditions déterminées d’après la présente loi.

Art. 2. – Les enfants ne pourront être employés par les patrons ni être admis dans les manufactures, ateliers ou chantiers, avant l’âge de douze ans révolus. – Ils pourront être toutefois employés à l’âge de dix ans révolus dans les industries spécialement déterminées par un règlement d’administration publique rendu sur l’avis conforme de la commission supérieure ci-dessous instituée. (Voir ci-après, Décret du 21 mars 1875.)

Art. 3. – Les enfants jusqu’à l’âge de douze ans révolus ne pourront être assujettis à une durée de travail de plus de six heures par jour, divisée par un repos. – A partir de douze ans ils ne pourront être employés plus de douze heures par jour, divisées par des repose.

Par l’article 2 il est facile de constater que le législateur se fait complice des manœuvres susceptibles de paralyser l’énergie et la volonté de l’être humain dès l’enfance.

Section II. – Travail de nuit, des dimanches et jours fériés.

Art. 4. – Les enfants ne pourront être employés à aucun travail de nuit jusqu’à seize ans révolus. – La même interdiction est appliquée à l’emploi des filles mineures de seize à vingt et un ans, mais seulement dans les usinges et manufactures. – Tout travail entre neuf heures du soir et cinq heures du matin est considéré comme travail de nuit. – Toutefois en cas de chômage résultant d’une interruption accidentelle et de force majeure, l’interdiction ci-dessus pourra être temporairement levée et pour un délais déterminé, par la commission locale ou l’inspecteur ci-dessous institués, sans que l’on puisse employer au travail de nuit des enfants âgés de moins de douze ans.

Ainsi donc tous les manieurs d’argent et brasseurs d’affaires rencontrés sur les marches de la Bourse, les mains chargées de liasses d’obligations, sont libres de tenir enfermés la nuit dans leurs bagnes, des enfants de douze ans et un jour (filles et garçons).

Les jérémiades des patriotes redoublent sur le cas de la dépopulation, mais ils n’ont garde de s’indigner des agissements usités envers ces victimes de l’usine, et c’est avec enthousiasme qu’ils parlent du progrès qui doit fortifier les nouvelles générations.

Art. 5. – Les enfants âgés de moins de seize ans et les filles âgées de moins de vingt et un ans ne pourront être employés à aucun travail par leurs patrons, les dimanches et f^tes reconnues par la loi, même our rangement d’atelier.

Escamotage des articles 4 et 5 par l’article 6.

Art. 6. – Néanmoins, dans les usines à feu continu, les enfanrs pourront être employés la nuit ou les dimanches et jours fériés aux travaux indispensables. – Les travaux tolérés et le laps de temps pendant lequel ils devront être exécutés seront déterminés par des règlements d’administration publique. Ces travaux ne seront dans aucun cas, autorisés que pour des enfants âgés de douze ans au moins. – On devra en outre leur assurer le temps nécessaire pour l’accomplissement des devoirs religieux. (Voir pour cette section, Décret du 22 mai 1875., ci-après)

(A suivre)

Honoré Bigot.