VIVONS NATURELLEMENT

On peut affirmer que l’homme n’a qu’un but dans la vie, vers lequel tendent tous ses efforts: jouir.

Il n’agit que déterminé par une sensation, et toutes ses sensations le poussent à chercher le plaisir et à écarter de la douleur.

Sur tous les points, il doit obéir à la nature, car celle-ci ne l’incite qu’au bonheur.

S’il en est ainsi, pourquoi subit-il le joug moral aussi bien que physique ? Pourquoi ne pas chercher à le secouer, à vivre selon la nature ?

La civilisation l’a abruti. Toutes les lois, toutes les morales contrarient les intérêts naturels de l’homme, et il ne fait qu’augmenter son mal par des remèdes puérils, par des remaniements de ces mêmes lois.

L’être humain a des besoins: il veut les satisfaire, mais en observant des règles qui représentent la contradiction de ses besoins.

Même les plus essentiels: les fonctions de nutrition et de reproduction, ne peuvent s’accomplir à l’aise. Et pourtant, l’homme désire chaque jour: manger, boire, dormir, aimer. Il ne peut exprimer ce qu’il sent dans notre monde à rebours; il doit réfréner ses désirs, refouler ses aspirations, supprimer son droit le plus légitime: vivre !

Et puisqu’il est né, il a pourtant droit à la vie !

Chaque animal (au sens ordinaire du mot) trouve à s’abriter, à se nourrir, et pratique l’amour en liberté.

Il n’y a que nous autres, animaux perfectionnés, pour avoir eu l’idée de se créer personnellement des entraves. Nous recherchons la souffrance, pour ne pas agir en « bêtes ».

La vertu, disent les pontifes de l’ordre social, consiste dans la privation.

Eh ! que nous importe cette sage morale destructive de nos intérêts immédiats. Agissons, toujours et partout, selon nos impulsions, pour notre bonheur ainsi que celui d’autrui. Débarassons-nous des préjugés et vivons tout de suite. Cela ne vaut-il pas mieux que mourir de faim à la recherche de l’or de tous les Klondyke ?

N’éprouve-t-on pas une certaine joie morale, quoique relative, à se sentir dégagé de l’oppression intellectuelle dans notre société perverse ?

Pour et par la nature, vivons ! Et préparons la voie libertaire.

Puisque la civilisation est en opposition avec le bonheur, celui-ci ne peut exister que dans l’état naturel.

Léon Saunier.